De 1885 à la Première Guerre mondiale, Giverny accueillit une colonie d’artistes qui fait du village l’un des lieux de naissance de l’impressionnisme américain.

La formation des artistes américains en France

Après la fin de la guerre de Sécession, en 1865, de nombreux artistes américains font le voyage jusqu’à Paris pour découvrir les dernières tendances de la peinture européenne. Ils vont admirer les collections du Louvre, visitent les expositions du Salon, et se forment dans les ateliers de grands peintres académiques. 

A la fin des années 1880, alors même que le temps des expositions impressionnistes s’achève, les œuvres de Claude Monet, Auguste Renoir, Edgar Degas commencent à intéresser les grands collectionneurs aux États-Unis. En France, les jeunes artistes américains se tournent vers la pratique de la peinture en plein air. Chaque été, ils quittent Paris et les académies pour la campagne, où ils se rassemblent dans des villages comme Barbizon, Grez-sur-Loing, Pont-Aven ou encore Giverny, où Claude Monet s’est installé en 1883.

Peindre en plein air à Giverny

De 1885 jusqu’à la Première Guerre mondiale, de nombreux Américains fréquentent Giverny. Ils sont séduits par les lieux, les habitants, et par le dynamisme de la communauté d’artistes qui finit par s’y former. Au bord de l’Epte, dans les champs et sur les collines qui entourent le village, les peintres expérimentent ensemble avec la palette claire et la touche fragmentée de l’impressionnisme.

À partir de 1887, la famille Baudy, qui tient l’épicerie-café du village, propose des chambres à ces visiteurs. L’hôtel Baudy se dote bientôt d’ateliers pour les peintres, de courts de tennis, adapte sa carte au goût américain et accueille de nombreuses fêtes.

John Leslie Breck, et Theodore Robinson, qui ont été parmi les premiers artistes américains à visiter Giverny, se lient d’amitié avec Monet, tout comme Lilla Cabot Perry et sa famille, qui louent régulièrement une maison voisine de celle de Monet entre 1889 et 1909. 

Vers un nouvel impressionnisme

Certains artistes vivent pendant plusieurs années à Giverny, comme le peintre californien Guy Rose, ou le couple d’artistes Mary Fairchild et Frederick MacMonnies. Theodore Butler s’installe définitivement dans le village après son mariage avec l’une des belles-filles de Monet, Suzanne Hoschedé. Sa présence contribue longtemps à la cohésion de la colonie américaine. 

Après 1900, une nouvelle génération d’artistes arrive à Giverny. Frederick Carl Frieseke et Richard E. Miller préfèrent aux paysages de la campagne normande, la figure humaine, les jardins et les scènes de la vie familiale. Ils élaborent un impressionnisme décoratif qui combine les effets de lumières chers aux impressionnistes et les préoccupations décoratives des Nabis. Frieseke et Miller, en compagnie d’autres artistes travaillant dans le village, exposent en 1910 à la Madison Art Gallery de New York sous le nom de « Groupe de Giverny ».

Contrairement à beaucoup d’expatriés américains, Frieseke choisit de rester en France pendant la Première Guerre mondiale, dont l’irruption met fin à l’existence de la colonie d’artistes américains de Giverny.

Visuel :
John Leslie Breck (1859-1899), L’Epte, Giverny, entre 1887 et 1891
Huile sur toile, 60,6 x 111,8 cm. Giverny, musée des impressionnismes, don Terra Foundation for American Art, Collection Daniel J. Terra, 2016, MDIG 2016.1.1
© Giverny, musée des impressionnismes / photo : Jean-Charles Louiset